Sortir du cadre pour innover… c’est ce qui a motivé les créateurs d’Obazyne dès le départ, l’ambition qu’ils nourrissent et font vivre chaque jour. C'est aussi ce qui guide le choix d'Obazyne dans son soutien aux artistes au parcours et à la démarche singulière.
Originaire de la côte niçoise, où il est né en 1962, Philippe GAUBERTI a toujours été attiré par l’art et projetait d’y consacrer sa vie. Un événement majeur est venu bousculer ses plans alors qu’il était tout jeune. Renonçant à intégrer l’école des beaux-arts, il décide alors d’entrer dans la vie professionnelle. Mais le désir d’art, toujours présent, a refait surface et occupe aujourd’hui la moitié de sa vie. Ses œuvres sont vendues aujourd’hui en France et à l’international.
La vie m’a fait, en effet, renoncer un temps à l’art, mais ça me rongeait… A la fin des années 90, j’ai donc commencé à faire des créations. Pendant 5 ou 6 ans, je me suis frotté à toutes les matières. Mais je jetais tout ce que je faisais car j’estimais que ça avait déjà été fait, en bien mieux. Il y manquait une identité. J’avais besoin de réaliser quelque chose qui puisse être identifiable, que les gens se disent en regardant : “Tiens, ça ne serait pas du GAUBERTI ça ?”
Au début des années 2000, j’ai décidé d’essayer le métal. Je suis allé voir un ferronnier d’art, Gilles BENAMOU, et je lui ai parlé de ce que je cherchais. Il m’a écouté et m'a dit “ Toi, tu devrais essayer l’inox”. Il m’a expliqué que ce métal avait des propriétés particulières, qu’on pouvait le polir jusqu’à obtenir un effet miroir… et j’ai adoré l’inox ! C’est un métal aux dimensions philosophiques : il réfléchit et peut faire réfléchir.
Cette personne m’a fait un don immense : pendant 4 ans, je suis allé chez lui tous les week-end et il m’a tout appris : à souder, à polir, à comprendre les contraintes et les réactions du métal… Il m’a transmis non pas dans une démarche du maître qui apprend à l’apprenti, mais avec le cœur... Aujourd’hui je maîtrise le métal grâce à ce cadeau qu’il m’a fait. Je lui dois tout. Il m’a ouvert la porte.
Il faut savoir qu’un artiste, surtout un sculpteur, est dans une forme de transe pendant qu'il travaille : la maîtrise de la technique libère l’esprit et permet d’être dans un travail inconscient. Cela amène à des choses qui vont parfois même nous surprendre. Il y a, à ce propos, une phrase de Soulages qui illustre tout à fait ce phénomène, et dans laquelle je me reconnais : ”Quand j’ai fini une œuvre, je comprends enfin ce que je cherchais”. C’est exactement ça.
Il y a une phrase de Soulages dans laquelle je me reconnais particulièrement : ”Quand j’ai fini une œuvre, je comprends enfin ce que je cherchais”.
C’est exactement ça.
En premier plan, Le Baiser de Philippe GAUBERTI
Après avoir trouvé mon matériau de prédilection, j’ai commencé à véritablement me projeter dans ce que je faisais pour y donner une dimension philosophique.
Il y a toujours 2 degrés dans mon travail.
Le premier degré est celui de la pure réaction émotive : c’est de l’ordre du “j’aime/j’aime pas”, un ressenti positif ou négatif. Au second degré, le spectateur découvre une explication symbolique, philosophique qui donne une autre dimension à l'œuvre.
L’art contemporain est un art qui veut se dépouiller de tout artifice émotionnel, de toute beauté pour ne laisser place qu’au message. L’art traditionnel, lui, est plutôt lié à l'émotion et inspire des réactions de l’ordre de “c’est beau, c’est coloré, c’est en mouvement...”. Je trouve dommage que l’art conceptuel se coupe de l'émotion et je crois possible la cohabitation entre une émotion et un message symbolique ou philosophique. En revanche, je ne pense pas qu’on puisse les placer au même degré.
Tout cela pour dire que, quand vous regardez le Baiser, vous pouvez avoir une réaction du type “c’est frais, c’est coloré, c’est en mouvement, c’est présent”… là on est dans le registre de l’émotion. Et puis, si ça vous intéresse, vous découvrez le message symbolique que j’ai voulu transmettre. Ce deuxième degré n’est pas indispensable pour apprécier l'œuvre, mais je suis convaincu qu’il augmente l’émotion.
Je pars généralement de quelque chose d'extrêmement normé, cadré, comme le cube ou le carré qui sont des figures parfaites. Je pense que pour pouvoir gagner sa liberté, déstructurer les choses, il faut partir d’une base parfaitement structurée.
Quand on regarde le cube extérieur du Baiser, on voit le côté que nous cherchons à montrer au monde : la face la plus lisse, la plus parfaite de notre personnalité, celle qui permet de se mélanger aux autres sans accrocs. Donc, la partie extérieure du cube, c’est ce que nous montrons au monde. La partie intérieure, elle, est beaucoup plus tourmentée. C’est notre beauté intérieure, qui est tellement plus belle, plus rayonnante, plus limpide. Elle nous réfléchit et renvoie des messages qui sont tellement plus forts…
Le Baiser fait partie de la thématique que j’ai nommée les Effusions. Et dans les autres sculptures de ce thème, entre les deux parties du cube brisé, on a une flaque d’inox, comme si le cube fondait ou pleurait. Cela signifie pour moi que montrer au monde notre véritable beauté intérieure, ça peut être dur et coûter des larmes ; mais c’est celle-là qu'il faut montrer et pas uniquement la surface polissée de l'extérieur.
Dans le Baiser, il n’y a pas de flaque d’inox mais une troisième partie de cube, posée à côté.
Les deux parties du cube semblent s’embrasser et, rassemblées, elles forment un cube complet. La troisième partie n’est donc pas un fragment du cube, c’est une partie “en plus”. On est dans la fusion d’un baiser, et lorsque deux personnes s’embrassent, c’est un troisième être qui existe. Dans l’amour, selon ma philosophie, un plus un, ça fait trois.
Pour répondre à votre question initiale, je dirais donc que ce qui traverse mon œuvre, ce sont les notions complémentaires de liberté, de sortie du cadre et de maîtrise.
Je pense que pour pouvoir gagner sa liberté, déstructurer les choses, il faut partir d’une base parfaitement structurée.
Je suis un hyperactif et j’ai la chance de dormir très peu. Je sculpte en semaine de temps en temps, la nuit et 100% de mes week-end et de mes congés. Il s’avère en plus qu’avec mon occupation de Directeur Général, je suis maître de mon temps.
Mais la sculpture m’aide à être Directeur Général car ce n’est pas le même côté du cerveau qui travaille dans ces deux activités : quand je sculpte, je repose mon cerveau “Directeur Général” que je vais réexploiter ensuite le lundi et vice versa. J’ai d'ailleurs un cérémonial amusant : quand, le dimanche soir, je quitte l’atelier, je le laisse en bazar volontairement de façon à ce que, lorsque j’arrive le samedi suivant pour travailler, je passe 30 mn à tout nettoyer. De cette façon, dans mon cerveau, je passe d’un monde à l’autre.
J'ai besoin des deux activités. Ma fonction de DG exige que je norme, j’optimise, j’ai cette méthodologie qui fait que chaque seconde est exploitée… sans cette rigueur d’esprit, je n’arriverais pas à mener les deux de front. Et il ne faut pas oublier que j’ai un agent. Moi je sculpte, lui s’occupe de tout le reste.
Quand je sculpte, je repose mon cerveau “directeur général” que je vais réexploiter ensuite le lundi et vice versa.
Oui, c’est vrai que je suis un DG atypique ! Je suis à la fois habité par des choses extrêmement normées, et c’est ce qui fait ma force, mais j’ai aussi ce petit grain de folie, cette particularité qui fait que j’emmène mes troupes là où elles n’auraient jamais imaginé aller... J’ai travaillé dans deux très grands groupes avant d'être dans cette entreprise et c’est vrai que dans ces structures, je dérangeais un peu. Dans mon entreprise actuelle, qui est quand même une entreprise importante, j’ai pu lâcher prise sur ce que je retenais, ce qui était impossible dans les grands groupes.
Depuis mon arrivée, il y a 12 ans, nous avons doublé notre nombre de dépôts et notre chiffre d’affaires est passé de 100 à 300 millions. Les équipes sont stables et n’hésitent pas à monter au front.
J’ai pris, par exemple, hier une décision qui est une mini “révolution” dans la manière d'approcher nos clients, un truc complètement inhabituel, et j’ai senti que j’avais l’équipe derrière. Ça, c’est le côté atypique qui rend plus humaine la relation dans un groupe. Donc, oui je sors assez souvent du cadre, mais mes racines sont cadrées.
Mes deux activités me permettent de faire de belles rencontres. J’ai rencontré Vincent BLACHOT en tant qu’artiste et nous nous sommes trouvés de nombreuses affinités et valeurs communes. Il a ensuite découvert l’autre facette de mon activité et nous avons commencé à travailler ensemble. Nous avons tissé une relation d’amitié faite de simplicité et de professionnalisme. C’est rare et précieux.
J’ai pris, par exemple, hier une décision qui est une mini “révolution” dans la manière d'approcher nos clients, un truc complètement atypique, et j’ai senti que j’avais l’équipe derrière. Ça, c’est le côté atypique qui rend plus humaine la relation dans un groupe. Donc, oui je sors assez souvent du cadre, mais mes racines sont cadrées.
Pour en savoir plus : www.philippegauberti.com